Les hommes aujourd'hui - Rôle et positionnement

Je suis plutôt féministe, on l'a compris (voir mes articles) mais en réalité je ne le suis pas : je ne suis féministe que parce que je dénonce l'injustice qui a été faite aux femmes dans notre histoire et encore aujourd'hui dans de nombreuses sociétés. 
Ce qui m'intéresse c'est l'égalité ou plutôt l'équité (voir mon article "égalité-équité" d'après Marie-Paule Thiriat) : la juste répartition des tâches, le respect du choix de chacun de participer aux 2 pôles : le productif (travail) et le reproductif (élever les enfants), la liberté et la justice.

Alors je pense qu'il est intéressant de se poser la question : aujourd'hui... OÙ EN EST-ON ???

Où en est-on de cette répartition des rôles ? où en est la femme et surtout (c'est l'objet de cet article) OÙ EN EST L'HOMME
Car je pense que face aux changements profonds qui ont eu lieu, les hommes sont en situation de désarroi et qu'ils cherchent leur place... une place que nous devrions les aider à trouver aussi, nous les femmes. Certains homme sont ou ont été de grands féministes (Condorcet, Michel Onfray) les femmes peuvent aussi être "masculinistes" parce qu'elles recherchent un réel équilibre entre les 2 sexes.
Quelle place prend l'homme aujourd'hui dans la famille et la société, quel rôle joue-t-il et finalement trouve-t-il son compte dans cette nouvelle répartition des tâches ?

Je voudrais commencer par réexaminer rapidement  l'histoire des relations entre hommes et femmes et surtout comment elles ont été modifiées par la libéralisation des femmes, en citant Elisabeth Badinter :

"Historiquement le modèle de la complémentarité des sexes et des genres, qui paraissait répondre aux voeux de la nature et de Dieu, a presque toujours engendré la dépendance des femmes et la domination masculine.
La femme règne sur le foyer et gère le quotidien et l'intime, tout en se voyant refuser l'accès au monde extérieur, au pouvoir politique et à l'indépendance financière. Elle ne peut donc en aucun cas se séparer de l'homme qu'elle ne supporte plus ou qui la délaisse. Quand le mariage est son seul horizon, une fois mariée, elle n'a plus d'échappatoire. L'homme lui, est "tout puissant" face à sa compagne (.....).
En schématisant un peu grossièrement on dira que la logique patriarcale de l'exclusion des sexes commence en Occident avec la démocratie athénienne, au Vème siècle avant JC, et que la fin de cette logique s'enracine dans la Révolution Française quand la démocratie voudra s'appliquer à tous (liberté égalité, fraternité). A partir de cette nouvelle idée (égalité) l'agonie du patriarcat durera deux siècles (...).
Peu à peu le féminisme fit preuve des capacités identiques des hommes et des femmes à gérer le monde et les femmes firent tomber l'une après l'autre toutes les citadelles masculines. Il fallut bien admettre que les femmes portent en elles une part de virilité, laquelle se développe plus ou moins selon son environnement et son histoire personnelle.
Du coup les genres autrefois nettement distingués se sont brouillés. Homme et femme ont plus en commun qu'on ne l'avait imaginé. Du coup se pose comme réelle interrogation la question identitaire : être femme ? , être homme, qu'est-ce-que ça veut dire ?"

Être homme aujourd'hui :

A/ MASCULINITÉ

Le 1er point que je voudrais souligner est que la "masculinité obligatoire" est un poids que la société a mis sur le dos des hommes : on a parlé avant de la part de virilité des femmes (qu'on leur a longtemps interdit)  et je veux souligner que la part de féminité des hommes a été encore plus strictement prohibée historiquement que la part de virilité des femmes ! 
"L'interdiction de toute expression de féminité a engendré chez le garçon une crainte tenace de ne pas être à la hauteur du modèle viril décrété "naturel", ainsi que la peur des femmes (et l'angoisse de l'homosexualité). Ce modèle masculin qui a dominé la presque totalité des cultures a engendré selon moi un homme mutilé et dominateur. C'est dans sa différenciation d'avec la femme, et souvent dans son opposition à elle, qu'il a trouvé sa fonction et sa définition" (Elisabeth Badinter - La Ressemblance des Sexes - avant-propos). 
On a imposé aux hommes d'être forts, virils, et de subvenir aux besoins de sa famille, sans avoir le choix, comme on a imposé aux femmes d'avoir un instinct maternel fort. Et on s'érige peu contre cette injustice : ce rôle obligatoire aussi étouffant que celui qu'on a voulu faire tenir à la femme.

B/ CONTROLE DES NAISSANCES 


L'autre point qui me semble très important d'évoquer, conséquence de la libéralisation des femmes, est l'importance de la contraception dans les rôles et positionnements hommes/femmes. En effet (et je cite encore Elisabeth Badinter) "la contraception porté un coup fatal au patriarcat en laissant la maîtrise de la procréation aux femmes. Ce n'est plus l'homme qui en décide en utilisant le retrait, mais la femme qui choisit ou non d'avoir un enfant avec cet homme. Le rapport de force s'est complètement renversé au détriment du père dépossédé d'un pouvoir essentiel. C'est d'elle que tout dépend : elle peut aussi bien refuser de faire l'enfant qu'il désire, que procréer contre sa volonté à lui, sans qu'il sache jamais qu'il est père. De ce point de vue on a substitué une inégalité à une autre ! (....) Jadis les hommes maîtrisaient la fécondité des femmes. A présent ce sont elles qui décident de leur paternité."

C/ POUVOIR PATRIARCAL


Enfin le 3ème point que je veux souligner pour terminer cette 1ère partie est que un des changements fondamentaux est que le père n'est plus l'incarnation de l'autorité, il doit désormais se faire sa place dans la famille, dans son couple,  auprès des enfants. Il ne peut plus compter sur un pouvoir conféré automatiquement : on doit trouver sa place face à sa compagne; on ne naît plus père, on le devient. Et c'est ça peut-être finalement le bouleversement le plus difficile à gérer pour un homme.

Les hommes continuent à subir le poids psychologique de cette masculinité imposée (je reparlerais un peu plus loin de cette "masculinité" lorsque j'aborderai le statut sexuel masculin), il a toujours aussi la responsabilité de la charge familiale (même si les femmes travaillent aujourd'hui, l'homme est et se sent responsable de subvenir aux besoins de sa famille et si il éprouve des difficultés dans cette tâche elles sont souvent accompagnées d'une vrai souffrance spychologique pour eux) mais ils ont parallèlement perdu le contrôle de la situation (paternité) et leur position dominante dans la famille (pouvoir patriarcal). 

C'est comme si ils avaient encore les désavantages de leur position d'homme tout en ayant perdu les avantages que leur conférait autrefois cette position. On peut donc commencer à comprendre pourquoi ces changements en profondeur des rôles hommes/femmes créent un certain désarroi chez les hommes.

Pour conclure cette 1ère partie je citerai de nouveau E.Badinter à propos du titre d'un de ses livres relatant les changements dans la société dus à l'émergence du féminisme : "L'UN EST L'AUTRE" "Ça ne veut pas dire qu'ils sont identiques, ça veut dire qu'ils se ressemblent plus que jamais dans l'histoire de l'humanité. "L'un est l'autre" ce n'était pas seulement une analyse de l'identité masculine et féminine, c'était aussi le constat que seul ce modèle universaliste de la ressemblance des sexes permettait d'envisager l'égalité. Parce que quand on est dans l'autre optique, c'est à dire celui de la complémentarité (l'un est ce que l'autre n'est pas) alors le monde extérieur est aux hommes avec le pouvoir, la réussite, l'épanouissement professionnel et intellectuel, et de l'autre coté il y a le monde privé, familial qui appartient aux femmes. Et à chaque fois on se retrouve avec le problème de l'inégalité, voilà. Donc le seul moyen d'en sortir c'était bien la voie que nous prenions : associer les hommes et les femmes dans les rôles et les fonctions." (...)

"Mais les hommes, eux, se retrouvaient d'une certaines façon sans identité... Je pense que c'est un facteur de doute et d'incertitude très difficile à vivre"




Alors essayons de voir dans une 2ème partie comment les hommes se sont adaptés à la nouvelle situation :


Le rôle de l'homme a évolué : il a pris plus d'importance dans l'éducation des enfants. Le partage des tâches et des pôles (productif/reproductif) se fait plus équitablement : la femme s'est mise à travailler et l'homme s'investit dans la famille. Et on peut dire que globalement chacun trouve du plaisir à ces nouvelles fonctions.

Les schémas sont bien entendu extrêmement variables d'une famille à l'autre, même au sein d'une même société (nous nous intéressons ici à nos sociétés dites "occidentales" laissant de coté la réflexion concernant d'autres sociétés plus archaïques) : du schéma le plus traditionnel  encore en vigueur parfois, à inverse total, plus rare, où l'homme reste à la maison alors que la femme travaille, en passant par tous les types de partages possibles (possibilités infinies).

A/ LA PLACE DE L'HOMME 


L'homme trouve une place relativement facilement dans la sphère du travail (car c'est un monde où il a l'habitude de se positionner historiquement) mais peut-on en dire autant de la sphère familiale ? Est-il facile aujourd'hui pour un homme de trouver une position dans cette entité qu'est la famille ou son couple ? Comment se positionne-t-il a coté de la mère ? Le législateur lui donne-t-il la place qu'on lui demande de jouer ? 

Je pense qu'il n'est pas toujours facile pour l'homme de trouver sa place, dans sa famille, et dans son couple, et cela pour différentes raisons : d'abord parce que les enjeux y sont infiniment plus lourds que dans la sphère professionnelle (puisqu'on est dans l'affectif, dans le moi en tant qu'être et non dans une position socioprofessionnelle), ensuite parce que c'est une nouveauté pour eux que d'avoir à acquérir une place alors que historiquement ils avaient un pouvoir naturellement conféré; mais aussi parce que la société est aujourd'hui très exigeante avec ce rôle de père/mari qu'on dit si important : il y a une lourde pression de la part des femmes et de la société sur les hommes pour qu'ils jouent ce rôle et qu'ils le jouent "bien".
Les femmes ont acquis une très grande force psychologique en se battant pour définir leur place et leur rôle. Les hommes, eux, n'avaient jamais eu à le faire. Or il est très difficile de trouver une place lorsqu'elle n'est pas clairement définie et dessinée ou imposée par la société : il faut la dessiner soi-même, s'impliquer, se questionner, essayer d'évaluer sa positon, réajuster, chercher un équilibre entre les deux sphères : famille/travail. Les femmes se sont battues pour définir la leur, les hommes ont encore un combat à mener pour réajuster leur position.

Et il me tient à coeur de dénoncer ici le non-sens qu'est à mon avis la position du législateur en ce qui concerne la position/rôle du père, et ce à plusieurs niveaux :
Il y a tout d'abord une injustice profonde dans les divorces : lors des séparation ce sont les femmes qui obtiennent majoritairement la garde de leurs enfants (même si des progrès ont été faits récemment). On demande aux hommes de s'impliquer dans l'éducation de leurs enfants mais lors des conflits on ne reconnait pas leur droit égal à celui de leur compagne à continuer d'élever leurs enfants au quotidien. Tout ce passe comme si dans la sphère privée on considérait l'homme capable de s'occuper de ses enfants mais légalement on ne lui reconnaît pas son importance, à égalité avec celle de la mère
Même chose pour le congé paternel de 15 jours seulement et pour les trimestres obtenus pour la retraite. Et c'est à mon avis une grande injustice qui est faite aux hommes ainsi qu'un non-sens : quand la loi positionnera les hommes à égale importance pour leurs enfants que les femmes alors peut-être pourront-ils finir de se positionner en tant que père aussi présent/important que la mère. 
C'est ça aussi l'égalité / l'équité.

B/ LE STATUT SEXUEL MASCULIN

Je vais maintenant essayer d'envisager l'homme non plus dans son statut de père, ou dans son rôle au sein de la société mais dans son statut sexuel, au sein de son couple
Je cite de nouveau E. Badinter : "L'interdiction de toute expression de féminité a engendré chez le garçon une crainte tenace de ne pas être à la hauteur du modèle viril décrété "naturel", ainsi que la peur des femmes (et l'angoisse de l'homosexualité).

"Être à la hauteur" est inscrit dans la psychologie et l'histoire de l'homme, c'est un poids énorme. Dans le couple, dans la sexualité c'est une difficulté immense ! 
Et c'est plus dur encore aujourd'hui car le féminisme a rendu les femmes exigeantes (dans le passé elles n'avaient pas d'alternative à leur mariage même si elles n'étaient pas heureuses, aujourd'hui ce n'est plus la cas) : être à la hauteur des attentes de sa compagne, arriver à la combler, à la faire jouir, à répondre à ses demandes/attentes...
(je voudrais d'ailleurs au passage dénoncer un poids qui pèse sur l'homme : lorsque la femme ne ressent pas de désir ou plaisir sexuel on a vite tendance à conclure que c'est l´homme qui n'arrive pas à la faire jouir - les hommes eux-mêmes s'en sentent responsables - alors que c'est souvent elle qui ne peut pas jouir parce qu'elle ne se le permet pas psychologiquement, ou parce que la situation qu'elle vit n'est pas propice au désir et au plaisir... voir mon article sur le désir féminin et sur la sexualité dans la famille).
Quelle pression pour l'homme !! 

Pour les hommes, un peu déboussolés par les changements dans leur rapport aux femmes, il est compliqué de comprendre le désir des femmes. La liberté qu'elles ont acquise les rends plus difficiles à satisfaire qu'autrefois. Dans le passé la satisfaction de sa partenaire était (malheureusement) peu importante, aujourd'hui c'est un challenge pour l'homme. Le contrat social était au fond moins exigeant autrefois : on se mariait par intérêt (souvent familial) et le bonheur n'avait pas grand chose à voir la dedans.


Mais où la situation devient encore plus compliquée c'est que parallèlement à cette pression, le féminisme a aussi introduit une notion de respect de la femme, fondamentale, mais qui poussée à l'extrême peut se révéler culpabilisante : le féminisme fait culpabiliser l'homme face à ses pulsions. Les femmes sont devenues critiques et parfois "méfiantes" face au désir de l'homme lorsqu'il n'est pas partagé ou qu'il ne leur convient pas. Les femmes, protégées par le féminisme extrême, finissent par se sentir agressées, rabaissées même par le désir de l'homme. On fait même du lynchage publique d'un homme lorsqu'il suit ses instincts sexuel et assouvi ses pulsions, comme ça a été le cas pour DSK (voir intervention l'Elisabeth Badinter pour la défense de Dominique Strauss-Kahn) qui finalement n'avait forcé personne. 


Pour résumer je dirais que les hommes sont pris dans un étaux entre d'un coté "l'obligation" de satisfaire leurs partenaires, les faire jouir lorsqu'elles en ont envie et aussi répondre à leurs attentes sociales de partage des tâches et de réussite, et de l'autre coté "l'interdiction" de les désirer quand elles ne le veulent pas sous peine d'être traités de montres...


Pour illustrer mon propos je vais retranscrire ici une question d'une lectrice lors d'un tchat sur lemonde.fr (dans le très actuel débat sur la prostitution) et la réponse de Françoise Gil (sociologue) qui illustre très bien la pression que les hommes peuvent parfois ressentir dans le sphère intime :


Anna : Cette question de la pénalisation du client de la prostitution ne pose-t-elle pas la question du statut du désir sexuel masculin? Celui-ci serait-il incontrôlable, irrépressible ou l'homme ne pourrait il pas supporter la frustration?

Je ne pense pas, c'est l'analyse de certains courants féministes. On sait très bien qu'il n'y a pas de besoin irrépressible. Mais la plupart des clients vont voir une prostituée pour avoir un espace de liberté dans lequel on n'est pas contraint d'être performant sexuellement - ce qui n'est pas le cas avec une copine ou une épouse. On peut demander à une prostituée des pratiques sortant de la norme habituelle dans un couple.
D'ailleurs, le comédien Philippe Caubère (signataire du manifeste des "343 salauds") a dit un mot très juste : ce sont les seules femmes avec qui il a un rapport gratuit. C'est tout à fait juste. Gratuit dans le sens où on n'a pas de comptes à rendre, on a payé, c'est carré. Je pense même que certains clients viennent déposer cette obligation d'être dominants en étant plutôt passifs, en se laissant mener par la prostituée.
Certaines féministes - je le suis aussi - disent que c'est le paradigme de la domination masculine. Elles se trompent, puisque pour toute prostituée il est important d'être toujours maîtresse de la situation, ce qui fait que ce sont toujours elles qui sont dominantes au moment de la passe. Pas pour des raisons idéologiques, mais de survie.

C/ QU'EST-CE-QU'UN HOMME AUJOURD'HUI ?

Pour essayer d'étudier ce que ça veut dire aujourd'hui "être homme" j'ai retranscris ci-dessous de longs extraits d'un article parût dans l'express en 1993 qui me semble essayer de couvrir les différents aspects psychologiques du positionnement de l'homme, soulignant leur difficulté à être masculin quand les valeurs masculines ont été dévaluées, soulignant aussi les contradictions des femmes, montrant du doigt certains excès du féminisme et les incohérences de notre système légale, pour finalement prôner un positionnement libre, individuel, de chaque être humain homme ou femme, avec des valeurs qui lui sont propres qu'elles soient "masculines" ou "féminines" respectant la spécificité de l'Autre indépendamment de son genre  (voir mon article sur l'identité).


"Tout se passe - apparemment - comme si les femmes servaient désormais de repères à leurs alter ego mâles, comme s'ils se définissaient en creux par rapport à elles, ou plutôt comme s'ils se laissaient définir par elles: étonnant retournement de situation, en vingt-cinq ans! Alors que, depuis quelques décennies, les rayons de librairie ont été submergés d'ouvrages sur la condition féminine, le féminisme et la féminitude, les hommes restent cois sur la masculinité, ou presque. Ils n'ont pas de discours collectif. Avant, ils n'avaient pas besoin d'en avoir: ils incarnaient la Loi et l'ordre social. Désormais, ils ont perdu leurs privilèges. Ce sont des femmes sociologues qui ont produit les plus gros pavés sur l'identité masculine. Christine Castelain-Meunier a tressé des couronnes aux "nouveaux hommes". Ces mecs d'avenir se caractériseraient par leur "ouverture d'esprit", leur libéralisme et leur respect du partage des rôles. ("Les Hommes aujourd'hui", Acropole). (...)
Evelyne Sullerot a volé au secours des pères, marginalisés par la législation et la pratique judiciaire. Grâce à elle, ils ont été en partie entendus. Enfin, Elisabeth Badinter a expliqué à l'ex-sexe fort que, entre "l'homme dur et l'homme mou", une troisième voie s'offre à eux: l'homme "réconcilié" avec sa part de féminin ("XY", Odile Jacob).
Et, pourtant, ce sont des femmes qui s'affolent: qu'avons-nous fait de nos hommes? Elles sont même intarissables sur le sujet, comme s'il fallait cultiver une vieille nostalgie. Elles disent qu'il n'y a plus d'hommes, que les femmes les ont "usés", comme l'écrit Elaine Cariou. (...) Cette ex-féministe des sixties et des seventies fait son autocritique, tout en précisant qu'elle ne regrette rien: "Mon corps m'appartient, mon compte en banque aussi, ma couette en hollofil aussi. Seulement voilà. Je suis seule parmi ces richesses" ("Du bon usage des mecs", Renaudot). Margaret Mead prédisait que, à la fin du xxe siècle, la société serait composée de cellules constituées de mères et d'enfants et que les hommes iraient de l'une à l'autre.(...) Elle explique également que les hommes sont perdus et qu'ils lui écrivent souvent pour demander un mode d'emploi: "Comment ça marche, une femme? La mienne n'est jamais satisfaite." La romancière déborde de compassion pour l'autre sexe: "On est pleines de contradictions. On veut être enlevées par le Prince charmant et conduire le cheval. On a envie d'être couvertes de bijoux et on trouve ça ringard. Comment peuvent-ils s'y retrouver, les pauvres?" La Canadienne Denise Bombardier, elle, se taille un succès de librairie avec ?La Déroute des sexes" (Seuil). Tous ces auteurs féminins concluent: la guerre des sexes est finie. Et maintenant, que vont faire les hommes?

SOS PAPAS

Les pères, dans leurs associations de défense, revendiquent: "pourquoi la garde des enfants ne nous est-elle accordée que dans 15% des cas de divorces conflictuels?" Et pourquoi n'avons-nous pas droit à un congé de paternité plus long et remboursé par la Sécurité sociale? "L'homme peut aussi bien qu'une femme s'occuper d'un enfant, dès sa naissance, gronde Stéphane Ditchev, du Mouvement de la condition paternelle. Nous prônons un vrai rapport d'égalité avec les femmes.

Les hommes sont-ils vraiment en danger? 

"Assurément! clame Yves Roucaute. Il y a une féminisation de la société qui conduit à une infantilisation générale. Ce pamphlétaire récemment divorcé n'a rien - jure-t-il - contre les féministes: "Je l'étais", assure-t-il. Il réserve son ire aux postféministes, celles qu'il appelle, "Moi-mon-corps-moi-mes-désirs", celles qui réclament le bonheur, tout de suite: "C'est une revendication terrible. Jamais un homme ne dit à une femme: j'ai droit au bonheur." Sous ses cris de guerre antimatriarcat, Roucaute laisse surtout entendre une protestation plaintive:
"On a du mal à jouer son rôle de mâle dans un système où finalement, quand on est un mec, on culpabilise sans cesse: tu ne fais pas les courses, tu ne fais pas ceci, tu ne fais pas cela! Bref, on n'en fait jamais assez!"

Le sociologue François de Singly, qui publie une "Histoire de la famille contemporaine" (Nathan), s'insurge contre ce spectre de la "féminisation": "Quand les hommes adoptent des valeurs féminines, comme la douceur, l'écoute ou les salades composées, on parle de féminisation?. Quand ce sont les femmes qui partagent des valeurs masculines, en pénétrant dans des secteurs professionnels hier réservés aux hommes, on parle aussi de féminisation?. C'est complètement absurde: il faut choisir." 

Autrefois, dans les romans de la fin du XIXe siècle, on se demandait gravement si les femmes n'allaient pas perdre leur féminité en allant travailler. Aujourd'hui, on se demande si ce ne sont pas les hommes qui vont perdre leur masculinité, comme si la féminité était devenue une maladie contagieuse. "Il est vrai, explique François de Singly, que certaines valeurs masculines axées sur l'exaltation de la force physique ont été dévaluées. En revanche, l'école et l'activité professionnelle, qui étaient perçues comme des valeurs masculines, n'ont pas vu leur cote baisser." Le sociologue souligne que les valeurs féminines liées à l'image de la ménagère trimant au foyer ont, elles aussi, baissé: "En fait, les hommes et les femmes modernes se sont moins différenciés les uns des autres qu'ils n'ont pris leurs distances, ensemble, avec les modèles des classes populaires et ceux des générations précédentes."
(...)

Qu'y a-t-il de différent, aujourd'hui, entre une fille et un garçon de 25 ans?

Ils ont, en principe, la même culture, les mêmes diplômes, les mêmes perspectives professionnelles et le même jeu de rôle à leur disposition. Quel type de jeunes mâles va débouler, demain, dans le monde agressif pour montrer qu'ils sont des hommes, des vrais ? Ils ne sont plus les détenteurs exclusifs de l'autorité et n'ont plus l'obligation de prouver qu'ils sont à la hauteur. Quelles sont les nouvelles valeurs masculines? Sûrement pas la virilité jugée comme la qualité la plus importante pour un homme par seulement 8% des Français (sondage Sofres- "Nouvel Observateur"). Alors, quid? "Ce n'est ni la violence, ni la domination, ni la singerie des femmes", affirme Gérard Petit, l'un des animateurs du Centre d'accueil des hommes violents de Lyon. "Les hommes violents se recrutent dans des couples où le partage des rôles est traditionnel, raconte David Welzer-Lang l'un des fondateurs de ce centre, ils considèrent leur femme comme une seconde mère. C'est elle qui est responsable de leur bonheur et de leur malheur. Leur violence éclate parce qu'ils ne sont pas autonomes." Le nouvel homme sera donc non violent, mais encore? "Je cherche, je cherche", répond Petit.
Il y a des laboratoires pour ça: ce que les Anglo-Saxons appellent les "men's studies", en pleine expansion aux Etats-Unis et au Canada, mais relativement confidentiels en France. 

Certains, parmi eux, n'ont pas attendu. Des groupes d'hommes se sont créés dès les années 70, dans la mouvance libertaire. Ils se réjouissaient d'avoir des compagnes "libérées" - "assez chiantes mais tellement plus intéressantes que des poupées gonflables", disent-ils aujourd'hui. "On se réunissait pour parler, raconte Jean-Paul, un rescapé. C'était l'occasion de boire des coups. C'était mieux que de s'inscrire dans un club de foot." Les groupes d'hommes fonctionnent toujours, discrètement. Quelques-uns ont expérimenté, en vain, les contraceptifs masculins. D'autres encore se réunissent pour le fun. Selon David Welzer-Lang, "on découvre plein de plaisirs qui étaient interdits aux hommes: parler de soi, de ses émotions, de la vie quotidienne, faire la cuisine, échanger des recettes". Comme des bonnes femmes? "Non! Même si l'on va vers une culture androgyne, nous sommes différents des femmes. Je n'ai jamais nié cette différence. Ce que je n'admets pas, c'est la hiérarchie des différences."


Et si tout cela n'était qu'une question de codes, comme l'avance François de Singly: "En fait, les différences objectives de comportements entre les hommes et les femmes qui se sont maintenues ne sont plus codées comme différences sexuées." Pour se justifier d'aller faire son jogging ou de laver sa voiture pendant que son épouse prépare le déjeuner du dimanche, l'homme ne fera plus référence au masculin. Il dira: "Ce n'est pas parce que je suis un homme que je fais cela, mais parce que ça me plaît." Et si, comme dans 80% des cas, c'est la mère qui prend un congé pour veiller son enfant malade, le père expliquera que, justement ce jour-là, il avait une réunion décisive et que ça n'a aucun rapport avec le fait qu'il soit un homme. L'important, c'est de s'inventer des mythologies: "L'idéal moderne du bonheur consiste à cultiver son moi profond en relation avec un autre moi profond hors du théâtre traditionnel", dit Singiy. L'idéologie de l'individualisme a en partie gommé les vieux clivages - classe contre classe, sexe contre sexe. Du droit à la différence collective, on a glissé vers le devoir de différence individuelle. "Je ne réagis jamais comme membre de la communauté masculine", dit Jean-Paul. Jouer à l'homme, c'est ringard. Ce qui compte, c'est - slogan culturel - de s'affirmer comme individu. La masculinité, dans tout ça? A chacun de "se" la bricoler. 

(Article complet : http://www.lexpress.fr/informations/qu-est-ce-qu-un-homme-aujourd-hui_595517.html :)



CONCLUSION :

Je ne veux pas moi non plus réagir en tant que "membre de la communauté féminine" même si l'équité entre les hommes et les femmes me tient à coeur (et on sait que, même si un bon bout de chemin a été fait, il reste des choses à corriger selon les milieux et en fonction de chaque famille). Je me sens membre de la communauté "des humains" ou même "des êtres-vivants" beaucoup plus que de la communauté féminine. 
Les hommes et les femmes doivent finir d'équilibrer leurs relations sans rancoeurs (les féministes ont parfois tendance à penser que l'homme c'est l'ennemi !), en tendant vers une réelle équité, réelle liberté des choix que l'ont fait indépendamment de son genre, et une réelle justice.

Un bon exemple de perversion du féminisme contre les hommes :
Doutes et regrets : l'affaire DSK

À lire sur le même thème :
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La femme et la sexualité familiale
Quand le féminisme dérape
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1 commentaire:

Unknown a dit…

un super article, très intelligement construit et proposé, et qui appellerait de très nombreux commentaires complémentaires...que j'essaierai de trouver le temps de faire...;o)